Les hépatites auto-immunes : actualités Foie_s10
L'hépatite auto-immune (HAI) est une maladie dans laquelle le propre système immunitaire de l'organisme attaque le foie et provoque son inflammation. La maladie est chronique et susceptible de durer de nombreuses années. Si elle n'est pas traitée, elle peut entraîner une cirrhose et une insuffisance hépatique.
Elle se caractérise par une cytolyse hépatique (révélée par l'augmentation d'enzymes qui montrent la destruction d'hépatocytes), une hypergammaglobulinémie polyclonale (résultant d'une surexpression d'immunoglobulines due à une activation lymphocytaire B), la présence d’auto -anticorps sériques et par une infiltration lymphocytaire périportale.
En l’absence de traitement, la maladie évolue vers la destruction progressive du foie avec la constitution d’une cirrhose. Chez certains patients on peut observer des poussées qui peuvent être responsables d’une insuffisance hépatique aigüe.   
Il existe deux types d’hépatites auto-immunes, le type 1 diagnostiqué surtout chez l’adulte et caractérisé par la présence d’anticorps anti-muscle lisse, et le type 2 caractérisé par la présence d’anticorps anti-LKM1, surtout observé chez l’enfant.
EPIDEMIOLOGIE
L’HAI est une maladie rare : son incidence est estimée en Europe entre 2 et 4 /100 000 personnes par an. Elle représente moins de 6 % des hépatites chroniques en France. La prévalence varie selon un gradient géographique nord-sud, il existe une fréquence plus élevée en Europe du Nord en relation  à l’association avec l’haplotype HLA A1-B8-DR3. Des gènes de susceptibilité pour les maladies auto-immunes sont présents chez les patients et dans leur famille. En effet, à côté de l’atteinte hépatique, chez ces patients, il est fréquent d’observer d’autres maladies auto-immunes extra-hépatiques.
La maladie peut débuter à tout âge, mais elle est particulièrement fréquente entre 10 et 30 ans et 40 à 50 ans. Elle touche à la fois les hommes et les femmes, mais il existe une nette prédominance féminine selon un ratio de 4 pour 1. En effet, les HAI touchent essentiellement la femme (70% des cas) et 50% des patientes affectées ont moins de 40 ans.
 Il existe également un pic d’incidence en période pré-pubertaire, à 10 ans pour le type 1 et à 6 ans et demi pour le type 2. La maladie est plus fréquente en phase pré-pubertaire et chez les filles.

LES SYMPTOMES
La présentation clinique est variable, près d’un tiers des patients atteints d’HAI 2T étant asymptomatiques, ce qui peut être à l’origine d’une reconnaissance tardive de la maladie, au stade de cirrhose dans 25% des cas. Ailleurs,  on peut observer  un ensemble de symptômes  non spécifiques, tels que l'asthénie (85% des cas), un ictère d’intensité variable (80%), une hépatomégalie (80%) ou des hépatalgies (50%). Dans environ 30% des cas, le mode de présentation est aigu et peut mimer un tableau d’hépatite virale.   
Plus rarement et en particulier dans les formes d’HAI-2 de l’enfant, la maladie peut se déclarer sous une forme sub-fulminante ou fulminante.
Dans la moitié des cas, des manifestations dysimmunitaires extra-hépatiques telles que des arthralgies, une dysthyroïdie ou un diabète insulinodépendant peuvent être associés.
Ainsi, schématiquement, la présentation clinique obéit à 3 situations :
·         Des anomalies du bilan hépatique avec  peu ou pas de symptômes.
·         Un tableau d’« hépatite aiguë »  comprenant un ictère,  des hépatalgies et des troubles digestifs. Ce mode de révélation concerne  plus de la moitié des cas et ce début aigu  pouvant aller jusqu'à l'hépatite fulminante.
·         Un  atteinte hépatique chronique responsable d’une cirrhose installée  à bas bruit : angiomes stellaires, érythrose palmaire, hippocratisme digital ou présence de signes d'hypertension portale (splénomégalie, ascite, hémorragie digestive...).
DIAGNOSTIC
 La maladie doit être évoquée devant toute élévation des transaminases car la méconnaître   peut comporter un risque d’évolution rapide vers la cirrhose, alors qu’un diagnostic précoce, compte tenu de l’efficacité des corticostéroïdes et des immunosuppresseurs, entraîne la guérison.

L’enjeu du diagnostic est de différencier une origine virale d’une cause auto-immune de l’hépatite : le traitement par interféron d’une HAI peut être fatal ; il en est de même d’un traitement immunosuppresseur d’une hépatite virale.
Le diagnostic repose sur les données de la biologie hépatique et la recherche des marqueurs d’auto-immunité. La biopsie du foie reste   indispensable pour la certitude diagnostique  et pour la prise de certaines décisions thérapeutiques importantes.
Néanmoins, aucun de ces éléments n’est spécifique de l’HAI  et son diagnostic  reste  un diagnostic d’exclusion. Ainsi, il convient d’éliminer d’autres  diagnostics : hépatites virales, hépatites médicamenteuses, la maladie de Wilson, l’hémochromatose, le déficit en alpha1 antitrypsine. Dans les formes cholestatiques, il faut en particulier réaliser une cholangio-IRM (en l’absence d’anticorps antimitochondries).  Chez environ 10 à 20% des malades, l’HAI est associée à une cholangite biliaire primitive réalisant un syndrome de chevauchement.

TRAITEMENTS


Il est fondé sur les corticoïdes et l'azathioprine. En seconde ligne, on peut utiliser le tacrolimus, le mycophénolate mofétil (MMF) ou encore des anticorps anti-CD20. Le MMF paraît très efficace en terme de réponses biologique et histologique chez des patients en rechute après l’association corticoïdes-azathioprine.
La durée de traitement est généralement de plusieurs années et 2 ans de biologie normale sont indispensables avant une décroissance ou un arrêt thérapeutique.  L’acide ursodesoxycholique associée à la corticothérapie, apporte un bénéfice au moins biologique à des doses de 750 mg/j. Ce traitement est conseillé dans les formes frontières.
La transplantation hépatique est indiquée en cas d’hépatite (sub) fulminante résistant à un traitement à fortes doses par corticoïdes ou en cas de cirrhose accompagnée de complications sévères. L’hépatite auto-immune représente environ 5% des indications de transplantation pour cirrhose. Le taux de survie après transplantation est de 90% à cinq ans et de 75% à dix ans. La maladie peut récidiver jusque dans 40% des cas ; cette récidive, qui peut se manifester sous différentes formes (parfois sévères), serait favorisée par une immunosuppression insuffisante ou par un greffon présentant l’haplotype HLA DR3.
CONCLUSION


 L’hépatite auto-immune est une maladie peu fréquente, atteignant surtout les femmes et touchant toutes les ethnies et tous les âges.  Elle nécessite un diagnostic  et un traitement rapides pour éviter l’évolution vers la cirrhose du foie.  Le diagnostic repose sur la présence d’une hypergammaglobulinémie, d’auto-anticorps particuliers et de lésions histologiques inflammatoires et nécrotiques et sur l’élimination d’une autre cause médicamenteuse ou virale.
OVERVIEW


Autoimmune hepatitis is liver inflammation that occurs when your body's immune system turns against liver cells. The exact cause of autoimmune hepatitis is unclear, but genetic and enviromental factors appear to interact over time in triggering the disease. Untreated autoimmune hepatitis can lead to scarring of the liver (cirrhosis) and eventually to liver failure. When diagnosed and treated early, however, autoimmune hepatitis often can be controlled with drugs that suppress the immune system. A liver transplant may be an option when autoimmune hepatitis doesn't respond to drug treatments or in cases of advanced liver disease.
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Dr MOUSSAYER KHADIJA الدكتورة خديجة موسيار Spécialiste en médecine interne et en Gériatrie en libéral à Casablanca. Présidente de l’Alliance Maladies Rares Maroc (AMRM) et de l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS), Vice-présidente du Groupe de l’Auto-Immunité Marocain (GEAIM)


BIBLIOGRAPHIE


Protocole National de Diagnostic et de Soins (PNDS) HEPATITE AUTO-IMMUNE  septembre 2021 https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2021-10/pnds_hai__vf.pdf
 Les Hépatites Auto-Immunes Centre Hépato-Biliaire Paul Brousse Centre hépato-biliaire Paul Brousse https://www.centre-hepato-biliaire.org/maladies-foie/hepatite-autoimmune.html
Kim  Luong Ba, Pascal Juillerat, Julien Ducommun, Hépatite auto-immune  REVUE MÉDICALE SUISSE 17 avril 2013 https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2013/revue-medicale-suisse-382/hepatite-auto-immune
Bonnivard Sophie, « Hépatite auto immune et critères diagnostiques », Hegel, 2019/4 (N° 4), p. 361-364. DOI : 10.3917/heg.094.0361. URL : https://www.cairn.info/revue-hegel-2019-4-page-361.htm


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POUR EN SAVOIR PLUS SUR L’ASSOCIATION MAROCAINE DES MALADIES AUTO-IMMUNES ET SYSTEMIQUES (AMMAIS)


Les objectifs d’AMMAIS, créée en 2010 à la suite d’une rencontre avec un groupe de marocaines atteintes de la maladie de Gougerot, sont d’informer et sensibiliser grand public et médias sur ces maladies en tant que catégorie globale afin que le diagnostic soit plus précoce, d’aider à leur meilleure prise en charge et de promouvoir la recherche et les études sur elles.
Elle organise régulièrement des manifestations comme la journée de l’auto-immunité, la rencontre sur le syndrome sec et la maladie de Gougerot-Sjögren… ou encore des rencontre clinico-biologique avec l’association marocaine de Biologie Médicale (AMBM). Le président d’honneur d’AMMAIS est le Pr Loïc Guillevin, professeur de médecine interne.
L’association se donne par ailleurs pour but de contribuer à la création par les malades eux-mêmes d’associations spécifiques comme l’association marocaine des intolérants au gluten (AMIAG), l’association marocaine de la fièvre méditerranéenne familiale (AMFM), l’association marocaine des malades d’angioedèmes (AMMAO)… AMMAIS est enfin à l’origine de la création en 2017 de l’Alliance des Maladies Rares au Maroc (AMRM) avec d’autres associations de patients atteints de maladies rares.
Elle s’est inspirée des modèles des pays plus développés, où des associations de malades atteints de maladies rares et des malades dépourvus d’association se sont unies depuis plusieurs années en « Alliances », telles la France avec l’Alliance Maladies Rares ou la Suisse avec Proraris.
Seconde journée de l'auto-immunité à Casablanca en 2012
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Seconde journée de l'auto-immunité à Casablanca en 2012

Les hépatites auto-immunes : actualités 2zome_12
Pr Loïc Guillevin président d'honneur d'ammais
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