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Des prescriptions de médicaments inadéquates chez beaucoup de personnes âgées
Plus on vieillit, plus on risque de souffrir de pathologies chroniques, en particulier de maladies auto-immunes,  nécessitant des traitements au long cours.  Il est alors important de bénéficier d’un usage optimum et raisonné des médicaments

Ce qui est loin d’être toujours le cas si l’on se réfère à de nombreuses études internationales, en Europe comme en Amérique, qui montrent que plus de 25 % des prescriptions médicales des personnes de plus de 65 ans sont potentiellement inappropriées (contenant au moins un médicament inadéquat), 40 % des prescriptions des plus de 75 ans sont inappropriées, et que la majorité de ces derniers sont soumis à une polymédication (plus de 5 médicaments) parfois délétère. 
QU’EST-CE QU’UN MEDICAMENT POTENTIELLEMENT INAPPROPRIE ?
Se définit comme médicament potentiellement inapproprié (MPI) celui pour lequel les risques sont supérieurs aux bénéfices.  Ce  phénomène a plusieurs raisons : la tendance du malade à attendre une solution thérapeutique à tout trouble et à être mécontent de sortir du médecin sans ordonnance ; la fragmentation des soins sans bonne coordination, quand le patient reçoit des médicaments de différents médecins ; le désir des médecins de bien guérir tous les troubles par la  prescription la plus complète, trop même car créatrice  d'autres déséquilibres…Résultat de tout cela : un tiers des hospitalisations des séniors dans les pays développés est lié  directement ou indirectement à un mauvais usage thérapeutique ! Le Maroc n’échappe pas à  ce constat global.
UNE MOINDRE TOLÉRANCE AUX MÉDICAMENTS AVEC L’ÂGE
 Avec le vieillissement, des changements importants  se produisent dans tout le corps rendant la personne âgée (PA) plus sujette aux effets secondaires des médicaments. En effet, la quantité totale d’eau de l’organisme diminue alors que la quantité de tissu adipeux augmente.  Ainsi, les médicaments solubles dans l’eau deviennent  plus concentrés et ceux solubles dans la graisse s’accumulent davantage dans cette dernière. De plus, les reins sont moins capables d’excréter les médicaments dans l’urine et le foie est moins capable de décomposer de nombreux médicaments.  De ce fait, les médicaments restent en plus grande quantité et  plus longtemps dans l’organisme  que chez un adulte de 30/40 ans  et leur passage est notamment plus agressif dans le cerveau. Ainsi, le paracétamol, un antalgique utilisé contre la douleur et/ou la fièvre, s’élimine deux fois plus lentement, le diazepam (valium), un tranquillisant, quatre fois plus lentement : il faut 80 heures - 3 jours ! - pour éminer la moitié de la dose donnée de ce dernier. Avec une prise quotidienne, une thérapeutique peut alors s’accumuler jusqu’à l’intoxication qui, de plus, n’apparaîtra souvent que plusieurs jours ou semaines après le début du traitement.
 Plusieurs catégories de médicaments sont plus susceptibles d'entraîner des effets indésirables, en particulier certains antalgiques, anticoagulants, antihypertenseurs, antiparkinsoniens, diurétiques, hypoglycémiants et psychotropes. La sur-médication (plus de 5 médicaments) est trop souvent nocive car on ne maîtrise pas toujours bien les interactions entre les différentes molécules.
DES EFFETS SECONDAIRES AUX CONSEQUENCES PARFOIS DESASTREUSES !
Fatigue excessive, diminution de l’appétit, perte de poids, vertiges, malaise... Les signes d’un accident médicamenteux sont assez banals.
Mal employés, certains médicaments sont responsables de véritables pathologies comme la dépression, la dénutrition (par baisse de l'appétit et du goût), les chutes, l’état de somnolence, la confusion aigüe ou encore les neuropathies.
Un usage inconsidéré d’antihypertenseurs peut provoquer des baisses trop importantes de la tension source  d’ étourdissements, de sensations de vertige et des chutes, aux conséquences parfois lourdes : la fracture du col du fémur est ainsi souvent à l’origine de la perte d'autonomie  et même  de la mort (en France, entre 15 et 20 % des PA décèdent dans l'année qui suit cet accident). 
 L’ABSENCE D’UN MEDECIN « REFERENT » AU MAROC DOMMAGEABLE A LA COHERENCE THERAPEUTIQUE
 La situation au Maroc est  complexe. Jusqu’à présent, beaucoup de personnes ne bénéficiaient pas des traitements nécessaires faute de moyens financiers. La généralisation de l’assurance maladie va heureusement améliorer leurs soins. Pour ceux qui ont déjà des assurances, la problématique est souvent identique à celle décrite dans les pays les plus développés, sinon parfois pire.  Les PA pratiquent encore trop un nomadisme médical, les amenant à se faire soigner à la fois ou successivement par plusieurs médecins en fonction de leurs pathologies. D’où une tendance à la sur-médication, alors que, comme en Europe, elles devraient avoir un seul médecin référent, le médecin de « famille », qui les prend en charge globalement en coordonnant l’ensemble des soins et en décidant des thérapeutiques.  Cela peut être notamment le médecin généraliste, le généraliste à orientation gériatrique, le spécialiste d’une pathologie particulièrement lourde, le gériatre ou le spécialiste en médecine interne. Ce dernier est d’ailleurs en général reconnu comme le plus apte  à prendre en charge les situations complexes et polypathologiques, de par sa compétence transversale. La règle d’or en gériatrie en tout cas  est de se concentrer sur la ou les 2 ou 3 pathologies principales mais de ne pas chercher à tout prix  à médicamenter  les autres petits écarts  à la normalité (comme une légère hypertension).
Le dernier point important à souligner est enfin la bonne observance des traitements par les malades eux-mêmes car c’est souvent leur défaillance qui pose problèmes par sous ou sur-médication : donc, respectez les prescriptions médicales, les recommandations des notices d’emploi (en vous faisant aider si besoin est) et  ne vous livrez pas  à l’automédication 
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Dr MOUSSAYER KHADIJA   الدكتورة خديجة موسيار
Spécialiste en médecine interne et en Gériatrie, Présidente de l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS), Présidente de l’Alliance Maladies Rares au Maroc (AMRM)
اختصاصية في الطب الباطني و أمراض  الشيخوخة
رئيسة الجمعية المغربية لأمراض المناعة الذاتية و والجهازية , رئيسة ائتلاف الأمراض النادرة المغرب


BIBLIOGRAPHIE
-          – Halte à l’overdose pour les personnes âgées ! Que Choisir Santé 28/01/2015
https://www.quechoisir.org/action-ufc-que-choisir-medicaments-halte-a-l-overdose-pour-les-personnes-agees-n14033/
-          – 30% des hospitalisations chez les personnes âgées liées à une médication inappropriée, Communiqué Université catholique de Louvain (UCL) 30 septembre 2016 
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-          Catégories de médicaments qui méritent une vigilance chez le patient âgé – Manuel MSD
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-          Solène Drusch , Mahmoud Zureik , Marie Herr   Potentially inappropriate medications and polypharmacy in the older population : A nationwide cross-sectional study in France in 2019  ,Elsevier Therapies September–October 2023, Pages   https://doi.org/10.1016/j.therap.2023.02.001
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Le Professeur Loîc Guillevin; président d'honneur d'AMMAIS
ANNEXE : LES BUTS ET L'ACTION DE L'ASSOCIATION DES MALADIES AUTO-IMMUNES ET SYSTEMIQUES (AMMAIS)
Les objectifs d’AMMAIS, créée en 2010 à la suite d’une rencontre avec un groupe de marocaines atteintes de la maladie de Gougerot, sont d’informer et sensibiliser grand public et médias sur ces maladies en tant que catégorie globale afin que le diagnostic soit plus précoce, d’aider à leur meilleure prise en charge et de promouvoir la recherche et les études sur elles.



Elle organise régulièrement des manifestations comme les journées de l’auto-immunité, les rencontres sur le syndrome sec et la maladie de Gougerot-Sjögren… ou encore des rencontre clinico-biologiques avec l’association marocaine de Biologie Médicale (AMBM). Le président d’honneur d’AMMAIS est le Pr Loïc Guillevin, professeur de médecine interne.
L’association se donne par ailleurs pour but de contribuer à la création par les malades eux-mêmes d’associations spécifiques comme l’association marocaine des intolérants au gluten (AMIAG), l’association marocaine de la fièvre méditerranéenne familiale (AMFM), l’association marocaine des malades d’angioedèmes (AMMAO)… ou encore l’association pour les personnes atteintes de rachitisme vitamino résistant hypophosphatémique (RVRH-XLH).
Ammais est enfin à l’origine de la création en 2017 de l’Alliance des Maladies Rares au Maroc (AMRM) avec d’autres associations de patients atteints de maladies rares. N’oublions pas à ce propos que beaucoup de maladies auto-immunes sont aussi des maladies rares !
Elle s’est inspirée des modèles des pays plus développés, où des associations de malades atteints de maladies rares et des malades dépourvus d’association se sont unies depuis plusieurs années en « Alliances », telles la France avec l’Alliance Maladies Rares ou la Suisse avec Proraris.
Enfin, les deux associations (sans beaucoup de moyens mais avec beaucoup de bonne volonté) entretiennent des relations d’amitié, de solidarité et de collaboration avec de nombreuses associations de malades à travers le monde comme l’association française de Gougerot-Sjögren (AFGS), l’Association Française des intolérants au gluten (AFDIAG), l’Association Française de la Fièvre Méditerranéenne Familiale et des autres Fièvres Récurrentes Héréditaires (AFFMF), l’American Autoimmune Related Diseases Association (AARDA), l’Alliance des maladies rares française, l’organisation World’s Hereditary Angioedema (HAEi)…Elles ont noué enfin des relations informelles avec des ONG dans le monde arabe (Algérie, Tunisie, Liban, Egypte…) et en Afrique (Sénégal, Côte d’Ivoire, Congo…).