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BA.4, XD, XE… Que sait-on des nouvelles sous-lignées d'Omicron?

dr.endorphine | Publié le ven 29 Avr - 3:22 | 1472 Vues

BA.4, BA.5, XD, XE... des sous-lignées de variants omicrons ou "recombinants" (résultant d'une combinaison entre deux souches différentes) ont été détectées dans plusieurs pays depuis le début de l'année. Quelle est leur ampleur aujourd'hui, dans le monde, et en particulier en France ? Quelles sont les différences par rapport au variant " omicron " ? Le point sur les dernières données disponibles.

Les sous-lignées BA.4 et BA.5


Deux nouveaux sous-variants de la lignée omicron, BA.4 et BA.5, classés comme " variants d'intérêt " par l'OMS, ont été détectés pour la première fois en Afrique du Sud en janvier-février 2022. Fin avril, plusieurs centaines de séquences avaient été soumises à la base de données mondiale Gisaid, provenant également du Botswana, du Danemark, de l'Angleterre et de l'Écosse. Ces deux variants seraient responsables de l'augmentation du nombre de cas quotidiens de Covid signalés depuis plusieurs jours en Afrique du Sud, où l'hiver commence.

Également suivis de près par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), les variants BA.4 et BA.5 sont assez semblables au BA.2, mais leur protéine Spike présente les mutations supplémentaires d'intérêt L452R et F486V, la première étant potentiellement préoccupante (elle a été décrite comme l'un des facteurs associés à la haute transmissibilité du variant delta). A l'heure actuelle, il n'y a pas de preuve de transmission communautaire en Europe (cas détectés sporadiquement, souvent liés à des voyages), ni de preuve que les BA.4 et BA.5 ont un impact clinique ou épidémiologique significatif.

En France, seuls 1 cas de BA.4 et 2 cas de BA.5 ont été identifiés, selon la dernière analyse de risque de Santé publique France (SPF) et du Centre national de référence des infections respiratoires (20 avril).


Variants recombinants


Ils apparaissent lors de co-infections : deux variants différents infectent une personne en même temps, et combinent leur matériel génétique. Plusieurs ont maintenant été identifiés dans le monde : XD, XF et XS sont des recombinants des variants delta et omicron, tandis que XE, XG, XH, XJ, etc. sont des recombinants des sous-lignées BA.1 et BA.2 de l'omicron.

Recombinants de BA.1 et BA.2


Différents variants recombinants de BA.1-BA.2 (XE, XG, XH, XJ, XL... XT) ont été séquencés, principalement au Royaume-Uni, au Danemark, en Finlande, en Allemagne, en Israël, en Inde...

Selon le dernier rapport de l'Agence britannique de sécurité sanitaire (UKHSA), environ 1200 cas de XE avaient été détectés début avril au Royaume-Uni (le premier a été signalé à la mi-janvier), mais ce variant représente moins de 1% des cas séquencés, les sous-lignées BA.2 et BA.1 omicron restant largement majoritaires (88,5% et 11% respectivement). La majorité du génome XE, y compris le gène S (codant pour la protéine Spike), appartient au BA.2.

Le XE aurait un taux de croissance supérieur de 12,6 % à celui du BA.2 ; cet avantage passe à 20,9 % si l'on ne considère que les données de mars. Toutefois, les autorités britanniques déclarent que cela ne peut pas encore être interprété comme le signe d'un avantage intrinsèque en termes de croissance (la relation avec les changements dans la politique de test est en cours d'exploration).

À ce jour, les recombinants XE et XL n'ont été détectés en France qu'à des niveaux négligeables.

Selon SPF, il est peu probable que ces recombinants BA.1-BA.2 aient des caractéristiques différentes des deux lignées parentales, étant donné leur similitude. Pour cette raison, ces recombinants sont désormais considérés comme appartenant à la variante omicron.

"Jusqu'à présent, il n'y a pas suffisamment de preuves pour tirer des conclusions sur la transmissibilité [de ce variant], la gravité [de l'infection] ou l'efficacité du vaccin", a également déclaré Susan Hopkins, conseillère médicale en chef de l'UKHSA.


XD ("deltacron")


Pendant la période de co-circulation du delta et de l'omicron, une cinquantaine de cas de co-infection ont été identifiés en France, ce qui a conduit à une surveillance accrue d'une éventuelle recombinaison. Le recombinant XD delta-omicron a été séquencé pour la première fois en février lors d'une enquête de routine de surveillance génomique Flash et on estime qu'il circule depuis début 2022. La majorité de son génome correspond à la sous-lignée AY.4 du variant delta, et une grande partie du gène S à la sous-lignée BA.1 de l'omicron.

En France, au 15 avril, 77 infections avec ce variant ont été signalées (54 cas confirmés et 23 suspects non séquencés), notamment en Normandie et dans les Hauts-de-France. Cependant, il n'a jamais dépassé 0,1% des cas séquencés lors des enquêtes Flash. Cette stabilité à de faibles niveaux de détection, comme la faible détection au niveau mondial, serait en faveur d'une absence d'avantage de transmission par rapport au BA.2, désormais majoritaire en France (99% des séquences omicron identifiées lors de l'enquête Flash du 4 avril).

Parmi ces 77 personnes infectées, l'âge médian était de 37 ans (le plus jeune cas avait 4 ans et le plus âgé 86 ans), ce qui est similaire à l'âge médian des cas omicron, mais avec une répartition différente - plus de cas chez les enfants et les personnes de plus de 60 ans, en particulier. La majorité des cas (72%) étaient associés à des clusters, le plus souvent familiaux. La proportion de cas XD ayant reçu 3 doses de vaccin était plus élevée que chez les cas omicron, mais cette différence est probablement liée aux différentes périodes d'investigation des deux variantes (novembre 2021-janvier 2022 pour omicron et janvier-avril 2022 pour XD).

Seuls 4 de ces cas étaient asymptomatiques. La principale différence entre les signes cliniques observés lors de l'infection par omicron et XD était le taux plus élevé d'agueusie et d'anosmie avec cette dernière. Enfin, parmi les cas investigués, 8 hospitalisations ont été rapportées, dont 4 faisaient partie d'un cluster hospitalier (hospitalisations pour des raisons autres que le Covid). Aucune admission en soins intensifs ni aucun décès n'ont été signalés à ce jour.

Qu'en est-il de la pathogénicité et de l'échappement immunitaire ?

Une analyse de ce recombinant par l'Institut Pasteur (publiée en preprint) a montré que la neutralisation du variant XD par des anticorps post-vaccinaux ou monoclonaux était similaire à celle observée contre BA.1, mais avec une réduction plus prononcée de l'efficacité du sotrovimab (Xevudy, maintenant disponible en France comme traitement curatif pour les patients à risque) contre XD que contre BA.1.

En revanche, dans un modèle murin, sa pathogénicité et sa réplication dans les différentes zones du système respiratoire ont montré des différences par rapport à l'omicron : une réplication plus efficace que BA.1 dans les voies aériennes supérieures mais moins efficace dans les poumons.
Lire aussi : Covid : quels médicaments sont aujourd'hui disponibles à des fins curatives ou prophylactiques ?


En conclusion

La situation en France en termes de variants circulants est aujourd'hui stable, avec une dominance du variant omicron BA.2, mais, dans le contexte épidémiologique actuel où l'incidence reste très élevée, l'émergence d'un nouveau variant dérivé de la souche dominante ou résultant d'une recombinaison ne peut être exclue.

En parallèle, de nouveaux candidats vaccins ciblant des mutations spécifiques de l'omicron sont à l'étude. Moderna, par exemple, a annoncé que son candidat mRNA-1273.214 comprenant 32 mutations spécifiques de l'omicron est en cours d'essai de phase II/III (premiers résultats attendus en mai-juin).

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